Julia est restauratrice de tableaux depuis six ans. Ce matin, elle reçoit une enveloppe avec des photos de La Partie d’échecs du peintre Pieter Van Huys, une œuvre qui date de 1471 et qu’elle doit restaurer. Le tableau présente deux joueurs penchés sur un échiquier et une dame, en arrière-plan, qui semble lire. Or, une photo prise aux rayons X révèle une inscription en latin Quis Necavit Equiem ou Qui a tué le chevalier ?, une inscription cachée par le peintre lui-même.
Julia perçoit alors qu’il y a quelque chose de non ordinaire dans ce tableau. Elle révèle l’information à Menchu Rock, la galeriste, qui est l’intermédiaire entre le vendeur et la société de ventes aux enchères. Elle veut solliciter Álvaro, le meilleur historien d’art, mais aussi son ex-amant, une liaison rompue depuis un an.
Ce que révèle la connaissance des personnages du tableau contraint Julia à continuer la partie, aidée par un joueur présenté par son mentor, César, un antiquaire. Et la mort frappe dans son entourage, dans cette partie qui se poursuit à travers les siècles…
Publié en 1990, traduit en 1993, ce livre a reçu le Grand prix de littérature policière de 1993. L’idée de faire continuer une partie vieille de plus de cinq siècles est originale. Cette partie, à l’origine, était déjà délétère quand on découvre qui la personnalité des protagonistes, leurs rapports et l’ambiguïté proposée par le peintre. En effet, l’un d’eux est décédé depuis deux ans.
Pourquoi Pieter Van Huys a-t-il fait une telle composition ? À la demande de qui ? Et pourquoi cette œuvre génère-t-elle des passions qui amènent à l’assassinat de personnes liées, aujourd’hui, au tableau ?
Arturo Pérez-Reverte développe une intrigue à la fois policière, historique, picturale, ajoutant le jeu d’échecs, explicitant ses règles, son attrait et ses connotations symboliques. Pierre Mac Orlan n’écrivait-il pas : “Il y a plus d’aventure sur un échiquier que sur toutes les mers du monde.“
Avec ce roman, le lecteur découvre la peinture du XVe siècle, les artifices des peintres pour installer ceux qui regardent le tableau dans la scène. C’est aussi tout le travail autour de la restauration d’une telle œuvre. Et, bien sûr, l’art du jeu. L’auteur présente la symbolique de chaque pièce et donne des illustrations de différentes phases, phases orchestrées par un assassin retors.
Avec ce livre, Arturo Pérez-Reverte, par ailleurs le créateur des aventures de l’ineffable capitaine Alatriste, signe un ouvrage remarquable par la profusion des données, par la tension soutenue jusqu’à un dénouement peu prévisible.
serge perraud
Arturo Pérez-Reverte, Le tableau du maître flamand (La tabla de Flandes), traduit de l’espagnol par Jean-Pierre Quijano, Folio Policier n°1 026, coll. “Thriller”, août 2024, 480 p. — 9,90 €.