Quand espionnage et trahisons font bon ménage
On retrouve les héros de la saga que Paul Doherty installe pendant les jours terribles des années 1380 où l’Angleterre était balayée par les vents violents du changement tant pour l’État que pour l’Église. Le romancier, aux neufs séries, propose ici la vingt-deuxième enquête de sa série. Cette fois encore, il explore une partie de l’organisation du pays mettant l’accent sur les liens très tendus entre les réseaux d’espionnage français et anglais. Une des racines de ces tensions tient au fait que la Couronne d’Angleterre estime avoir des prérogatives sur la Couronne de France.
Avec sa connaissance approfondie de cette époque, Paul Doherty donne un récit détaillé des structures de Londres, de la ville et du mode de vie de ses habitants, qu’ils soient dans les bas-fonds ou sous les ors des palais.
La Maison des Secrets, la Chancellerie secrète de sa Majesté le roi Richard II, protège surtout les complots et basses œuvres de Jean de Gand, l’oncle du jeune roi, qui s’est autoproclamé régent et de son âme damnée, Thibault, le Maître des Secrets.
Vincent Edmonton, un clerc qui travaille dans ces lieux, rentrant chez lui trouve le Maître des clés qui l’attend. Celui-ci, contre quelques informations qui semblent anodines, lui donne une bourse de bon argent anglais pour satisfaire son addiction au jeu de dés.
Hugh Norwic, le clerc principal de cette chancellerie secrète, a été alerté par Thibault qu’un traître se dissimule dans son service. Très préoccupé, il vérifie soigneusement la fermeture des lieux avant de partir retrouver la douce ambiance de La Délicieuse, un claque maquillé en taverne cossue. Il veut s’assurer que tout est normal dans la cave où sont enfermés les documents les plus explosifs. Seulement accessible par un escalier dangereux, il chute et décède au pied des marches. Un autre clerc est retrouvé empoisonné dans une chambre de La Délicieuse.
C’est à partir de ces morts suspectes que Thibault convoque Sir John Cranston, le coroner principal de Londres et Frère Athelstan, pour faire émerger la vérité sur ces crimes et arrêter la fuite des informations. Ils doivent, alors, se lancer dans une course contre la montre pour démasquer les traîtres avant que leur propre vie soit en danger…
Le récit est convaincant, étayé sur une documentation pléthorique. Mais autour des données historiques, l’auteur construit une belle intrigue avec ce qu’il faut d’actions, de complots, de traîtrises, de dangers pour faire croître une tension jusqu’à une chute parfaitement amenée.
Un nouvel épisode des enquêtes de ce curé dominicain, attrayant au possible tant pour l’apport historique que policier.
serge perraud
Paul Doherty, La conspiration des Mystérieux (Murder Most Treasonable), traduit de l’anglais par Elisabeth Kern, Éditions 10/18 n° 5 907, coll. “Polar”, juin 2024, 384 p. — 8,90 €.