Isabelle Bauthian & Nicoletta Migaldi, Opportune

Dans un uni­vers chimérique…

La scé­na­riste prend comme cadre de son récit un uni­vers bien chao­tique. Les Sor­sa­vants, sortes de dieux, avaient créé la Terre et les nues. Ils ont ins­tallé une royauté tout en res­tant les maîtres du jeu. Mais les monarques ont voulu se débar­ras­ser d’eux et les ont exter­mi­nés. Une sur­vi­vante fomente alors la révo­lu­tion mais, seule, elle ne peut main­te­nir l’équilibre des élé­ments. Les nues se sont effon­drées plon­geant la Terre dans un orage éter­nel, don­nant nais­sance aux limbes. Elle jette une malé­dic­tion sur la famille royale et sur tous ses fidèles.

Oppor­tune saute d’un bateau volant en pro­met­tant d’être pru­dente et de rame­ner la Bête. Res­tent sur le bateau, outre l’équipage, Cae­sar et second et la cliente, une dame âgée en fau­teuil rou­lant. Doc­teur en météo­ro­lo­gie, Cae­sar annonce un risque, risque mis en doute par le chef de quart, ce qui déclenche un mou­ve­ment d’humeur qui amuse la cliente. Oppor­tune et la Bête, qui porte pour nom Épi­gone, se retrouvent, se com­battent. Mais les cir­cons­tances les obligent à s’entendre car…

Oppor­tune est une cor­saire qui gagne sa vie en tra­quant et en livrant nombre de monstres à la jus­tice révo­lu­tion­naire. Épi­gone, en tant que garde du palais, a affronté une armée de révo­lu­tion­naires pour défendre la famille royale. Mais, s’il a, à ce jour, échappé depuis trente-sept ans à toutes les recherches, il a été frappé par la malé­dic­tion. Oppor­tune, pour l’approcher, lui dit pos­sé­der les moyens de lui rendre son appa­rence humaine.
On ne peut s’empêcher de pen­ser, avec ce couple, aux per­son­nages du conte de Gabrielle-Suzanne de Vil­le­neuve, La Belle et la Bête dont Jean Coc­teau a tiré ce fameux film dans lequel Jean Marais incar­nait le monstre avec maes­tria. Les thèmes abor­dés étaient alors l’amour et la rédemp­tion. Ici, le cadre est dif­fé­rent car la belle ne se sacri­fie pas pour sau­ver la vie son père, mais pour s’en empa­rer. De plus, la révo­lu­tion est mon­trée comme un pis-aller, les nou­veaux maîtres inter­di­sant la culture, fai­sant brû­ler les livres. Et quand on com­mence à brû­ler les livres…

Le gra­phisme de Nico­letta Migaldi qui réa­lise des­sins et cou­leurs assure un réa­lisme au scé­na­rio en pro­po­sant des humains de belle fac­ture, des bêtes agréables à regar­der même pour les plus détes­tables. Elle livre deux planches, retrou­vant la pré­sen­ta­tion des planches illus­trées, proche de celles immor­ta­li­sées par Epi­nal.
Un album qui mêle adroi­te­ment thèmes socié­taux et aven­tures dans un uni­vers chimérique.

serge per­raud

Isa­belle Bau­thian (scé­na­rio) & Nico­letta Migaldi (des­sins et cou­leurs), Oppor­tune, Bam­boo, Label “Dra­koo”, mai 2024, 64 p. — 15,90€.

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