Faire le portrait d’un artiste peut impliquer un exercice d’humilité. Renoma mêle son talent en ce qui devient presque une fiction mais plus vraie que le réel au sein d’une telle déambulation de ressemblance et de voisinage afin de créer un rapport complice entre le créateur et ses racines.
Nous retrouvons dans sa prochaine exposition des miroirs — avec envie de légèreté — pour s’y surprendre lui-même avec élégance suprême et les traverser pour s’envoler ailleurs très tôt dans son œuvre. Maurice Renoma crée sa genèse entre le Dadaïsme, la Pop culture, le Néopop et le discours écologique. En conséquence, l’artiste adepte d’objets singuliers investit “l’Appart” et le “Souplex” avec sa nouvelle expérimentation artistique, qui célèbre l’art des révolutions.
Renoma, par son langage, sa curiosité sans marge voit son désir permanent d’expérimentation se refléter dans la réalisation de cabinets de curiosités au sein de l’exposition. S’y alternent patchworks, collages, ready-mades, produits en série, photos, films, musiques, installations et poésies visuelles qui explorent des thèmes telles que la consommation, la pollution, la politique et la guerre.
Le Pop Art « pèse » sur l’imaginaire du créateur pour mieux l’alléger au moment où il est devenu couturier de haute couture ou plutôt le premier designer de mode à ériger le ready-made en modèle créatif. Ses collections séduisent les artistes les plus célèbres, dont Andy Warhol qui adopte le multipoches et le blazer Renoma. D’ailleurs, ce dernier est comme un leitmotiv en une mise en abyme avec le peintre chinois Yuan Chen réuni dans des grandes toiles peintes.
Mais il y a plus : à travers cette exposition, Maurice Renoma lance son proprio manifesto, un mouvement poétique, joyeux et invitation à l’extravagance, à la spontanéité et la liberté avec toujours avec une touche d’humour et d’ironie. Une fois de plus, son œuvre nous invite à réfléchir à la nature de l’art et à sa place dans la société
L’ensemble donne toutefois la priorité à l’expérience de la maison intérieure du créateur. Photographe et poète, il ignore la vision déshumanisée qui prévaut chez tant de créateurs. Son art polymorphe explore la fusion douce et progressive des formes et de leurs souvenirs. Ce sont autant de pèlerinage au sein des symptômes amoureux, des « essais » visuels pas forcément romantiques mais inspirés de lieux et de techniques artistiques appuyées par un tel démiurge maniant différents agents additifs et addictifs des plus variés.
Par le rappel aux mouvements cités par l’exposition, le désir est passé au crible afin de savoir lequel de ces mouvements bénéficie de la préséance. Reste à savoir pourquoi idéaliser “l’aimante” et s’il est possible d’aimer sans objet. Mais le terrain de cette exposition sera vaste. S’y découvrira encore plus de fantaisie chez le créateur.
Il rend intelligible un mouvement prélude à de grandes ascensions. Le quotidien serait bien terne sans la présence d’un tel créateur et promeneur des rives du monde – du Japon aux USA en s’inspirant et s’appuyant autant sur les pensées iconoclastes que celles des mystiques, d’Albert Cohen, de Freud, de Lacan comme de la vie de Dali — ce ne sont là que quelques exemples. Mais dès lors, une telle prospection ne peut finir. Le visiteur va pouvoir explorer les recoins de ce voyageur avide de « transports » amoureux.
jean-paul gavard-perret
Maurice Renoma, Corps Pop, Esprit Dada, Du Dadaïsme au Popisme, Appart & Souplex Renoma 129 bis rue de la Pompe, Paris 16e, octobre 2024.
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