Avec cet album, les frères Guilloteau plonge le lecteur dans le monde du rugby, celui des équipes de village, les chocs virils sur la pelouse, les troisième mi-temps épiques… Ils livrent un bel hommage à ce sport amateur où l’esprit d’entraide, la camaraderie ne sont pas de vains mots. Et Joachim sait de quoi il parle ayant été joueur professionnel pendant plusieurs années et entraîneur durant dix ans.
C’est aussi un hommage à tous les bénévoles qui font vivre les clubs, les associations. C’est l’esprit de village qui est montré, un esprit que l’on retrouve partout quand s’exerce la volonté de femmes et d’hommes de le faire exister.
En ce dimanche 15 mars 1988, Marius est dans une colère noire à cause des paroles de l’entraîneur de l’équipe adverse. En 1998, il use de la même rhétorique qu’il emploie, encore dix ans après. Mais cet après-midi, alors qu’il invective ses joueurs de rugby estimant qu’ils jouent mal, son cœur lâche. Ils ne sont que deux anciens rugbymans à assister à la crémation, Louis, dit Le Doc, et Paulo. Ils retrouvent Charly qui n’a pas voulu assister à la cérémonie.
C’est au stade qu’ils répandent les cendres de Marius. Puis, autour d’une bonne bouteille, ils font le point sur la situation désastreuse du club, la trésorerie est exsangue, les joueurs, non payés, sont partis… En sortant, ils découvrent un énorme panneau annonçant l’implantation du nouvel Interchampion. Sur le stade ! Et le trio, poussé par le tenancier du café du stade, se rend à la mairie pour faire avorter le projet. Mais, pourquoi garder un stade alors qu’il n’y a plus d’équipe ? Alors, il faut…
L’intrigue met en scène cinq vieux briscards, des anciens joueurs qui veulent tout faire pour sauver le club de leur jeunesse. S’appuyant sur ce point de départ, les auteurs multiplient les difficultés pour le groupe car le temps a passé et des choses ont changé.
Et si la solution venait, une fois de plus, des femmes ? En effet, les équipes féminines de rugby sont en plein essor et font partie, bien qu’il y ait encore du chemin à parcourir, du paysage sportif et sortent d’une sphère confidentielle.
Le dessin en noir, blanc et gris est l’œuvre de Boris qui, avec un trait rond, rend des planches superbes, opérantes dans la mise en page et dans la galerie des protagonistes. Il met en images, avec efficacité les émotions, les sentiments fait ressentir les liens entre les personnages.
Un album attachant, qui se termine par une jolie pirouette, à l’intrigue forte, servie par un graphisme solide.
serge perraud
Boris & Joaquim Guilloteau (Scénario), Boris Guilloteau (dessins et couleurs), Adieu Coach, Bamboo, Label “Grand Angle”, mai 2024, 96 p. — 19,90 €.