Gaël Nofri, Bouvines. La confirmation de la souveraineté

Bouvines vue autrement

Nous connais­sons tous le fameux dimanche de Bou­vines. Peut-on encore en dire quelque chose? C’est le pari réussi du beau livre de Gaël Nofri que de relire cet évè­ne­ment fon­da­teur à tra­vers le prisme de la sou­ve­rai­neté, sans se conten­ter d’une vision franco-française.

C’est là toute ori­gi­na­lité de la démarche de l’auteur. En effet, il replace bien sûr cette bataille rem­por­tée par Phi­lippe II Auguste dans la longue pers­pec­tive de la construc­tion capé­tienne d’un Etat sou­ve­rain, uti­li­sant la féo­da­lité à son pro­fit tout en la com­bat­tant. Sou­ve­rai­neté indis­so­ciable de la nation. Le “mort aux Fran­çais” lancé par un che­va­lier ennemi sur le champ de bataille expri­mait l’affirmation iden­ti­taire en cours de construc­tion. L’empereur Othon IV, battu, s’enfuit sans gloire. La coa­li­tion était ainsi défaite, après la vic­toire rem­por­tée contre Jean sans Terre à La Roche-aux-Moines.

Or, ce que l’on oublie, c’est que cette défaite infli­gée au roi d’Angleterre fut le coup de grâce pour l’empire Plan­ta­ge­nêt. A la suite de son échec, Jean sans Terre crut néces­saire une levée d’impôts, laquelle pro­vo­qua la rébel­lion des barons, d’où naquit la Magna Carta, acte fon­da­teur du régime anglais. Pour ne pas dire de la nation anglaise. Le lien avec la France et le conti­nent était rompu. La sou­ve­rai­neté anglaise était née elle aussi. Alors qu’au sein du Saint Empire romain ger­ma­nique, Othon IV ne sur­vé­cut pas à sa défaite. Le règne de Fré­dé­ric II eut beau être pres­ti­gieux, il ne put enrayer la dyna­mique affai­blis­se­ment interne qui minait la struc­ture impé­riale : le main­tien du prin­cipe de l’élection, dont les Capé­tiens sur­ent très vite se débar­ras­ser. Cette fra­gi­li­sa­tion leur offrit aussi la pos­si­bi­lité de repous­ser les fron­tières de leurs ter­ri­toires vers les confins orien­taux, depuis l’Auvergne jusqu’à la Bour­gogne en pas­sant par le Dauphiné.

Bouvines fut bien un évè­ne­ment fon­da­teur. celui de la sou­ve­rai­neté. Et donc de l’Etat royal qui accou­chait d’une nation.

fre­de­ric le moal

Gaël Nofri, Bou­vines. La confir­ma­tion de la sou­ve­rai­neté, Passés/Composés, avril 2024, 240 p. — 24,00 €.

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