Sortant de nos demeures et de notre monde dit blanc, Otte tente de déconstruire (si l’on prend un logos affecté) les éléments de la nature et de l’être. Toutefois, c’est pour ensuite recomposer par degrés la grande figure connue sous nom de l’âme même si Otte rappelle qu’elle fût mise au pillage.
Mais il est l’heure de la recréer dans une postulation pascalienne. Comme son prédécesseur, Otte souligne notre misère affective — chair comprise. Nos enfantillage et reflexes furtifs ne permirent jusque là que de sentir la carte de notre identité. Il faut donc un transit « qui ne l’est pas moins dans ces limbes aux baies vitrées qui nous séparent du dehors. »
Tout dans ce livre devient l’apprentissage de la transparence, et de ce garde au cœur en clairière à la croisée du corps. Il s’agit de récurer l’âme, s’expurger l’esprit afin que rien ne soit de même nature que nous-mêmes. Dès lors, le poisson fou file sous le merveilleux qui se tisse en s’obligeant à l’impression de l’improvisation.
Certes, un petit vide s’avive dans l’esprit mais l’inspiration se mue en aspiration. Des hérons passent en reflets gris-bleu au-dessus de l’étang. C’est le temps du libre détachement au profit de l’oisiveté luxueuse et concertée.
L’aventure de la vie devient très intérieure. Nous sommes en quête d’une fiancée qui se mire aussi à son inconnue. Les jours roulent, s’enroulent et se confondent dans l’ombre amoncelée au fond des mémoires. Mais plus question d’usurper qui nous prétendons nous afficher. Optons bien plus “géranium, sang, fougère, fourrure, fouine et fétiche.” et des rebuts d’existence pour résoudre le rébus du vital.
La terre, dit-on, est la chair d’un dieu disparu. Mais Otte rappelle que ce n’est pas forcément la solution. Alors, soudain, quelque chose avance. Ne prenons plus notre âme comme une arrière-boutique. D’autres travaux nous attendent. C’est en ce sens qu’un tel livre de nature et métaphysique indique la marche à suivre.
jean-paul gavard-perret
Jean-Pierre Otte, L’immunité merveilleuse : Aventure sans alibis, Edition Sans Escale, juin 2024, 90 p. — 15,00 €.