Une enquêtrice qui n’a pas froid aux yeux
Le choix de l’héroïne par l’auteure est judicieux car il porte sur une population qui n’a pas souvent les honneurs des premiers rangs. Glory est une femme noire qui se définit elle-même comme vieille et grosse. Divorcée, elle mène une existence assez simple sauf le dimanche où elle participe à la séance du Red Hat society d’Acadiana, un club où se réunissent des femmes noires, catholiques et pieuses, et où elle exerce son activité… illégale.
C’est après la messe que Glory Broussard se rend au CC’s, son café habituel. Mais, ce dimanche, elle est excédée car le garçon, un nouveau, ne l’a pas encore servie. Or, le dimanche est son jour de recettes et son travail l’attend. Elle est bookmakeuse à son compte.
C’est à ce moment que le lieutenant Landry, qui a bien connu sa mère, vient la saluer. Pendant la conversation, il reçoit un appel relatif à une femme décédée. Quand Glory entend l’adresse, celle d’Amity Gay, sa meilleure amie, sa sœur, elle veut accompagner le policier. Sur place, ils constatent que la religieuse s’est pendue avec sa ceinture monastique. Delphine, sa fille, avocate à New York est venue pour les obsèques. En revenant chez sa mère, celui-ci trouve une lettre émanant du tribunal de Lafayette. Une plainte a été déposée en raison de l’état périlleux de sa maison.
Le lendemain, Delphine commence à remettre en ordre, vider, car Glory est une collectionneuse compulsive qui chine et garde tout. En bavardant, Glory fait part de ses doutes quant au suicide de son amie. Celle-ci était mobilisée par de nombreux projets. Elle décide d’enquêter. Chez son amie, elle trouve du Fentanyl, une drogue dont elle reconnaît le logo sur l’emballage. Elle part sur cette piste……
Se pose l’interrogation sur la mort de cette femme qui, après une jeunesse dévergondée avec Téquila, drogue, mauvais garçons, mauvais choix, a choisi d’entrer dans la congrégation des Sœurs de la Sainte Famille. Aidée par sa fille qui traverse une mauvaise passe avec son époux et la famille de celle-ci qui n’a pas accepté que leur fils épouse une noire, elles vont s’investir, à la fois dans la restauration de l’habitation et dans la recherche d’indices menant vers un coupable.
Bien sûr, Glory va devoir payer de sa personne, faire front à des intimidations, se glisser dans des lieux peu faits pour elle, jusqu’à un dénouement qui lui vaut bien des soucis.
Mais la romancière décrit le quotidien d’une telle femme et la condition de ces femmes noires qui ne comptent pas. Ne fait-elle pas dire à son héroïne : «Lorsqu’une femme noire est attaquée ou disparait, les gens regardent ailleurs»? Danielle Arceneaux distille nombre de réflexions pertinentes, des images très parlantes, et glisse un bel humour tant dans les dialogues que dans les situations, dans les avatars subis par Glory.
Un premier roman très agréable à découvrir tant pour l’intrigue pétillante que pour cette héroïne qui donne envie de la retrouver dans de nouvelles aventures.
serge perraud
Danielle Arceneaux, Glory B. enquête : Frayeur en Louisiane (Glory Be), traduit de l’anglais (États-Unis) par Emmanuelle Heurtebize, Robert Laffont, coll. “La Bête Noire”, mai 2024, 288 p. — 14,90 €.